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couverture du livre Verapoisse écrit par Dominique Noudi

Dominique Noudi Verapoisse

274 pages
A5 : 14.8 x 21 cm
sur papier 80 g bouffant ivoire
Style litteraire : Jeunesse
Numéro ISBN : 978-2-9544124-0-5

17.00 € TTC

Frais de port inclus France
Métropolitaine uniquement

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Présentation de Verapoisse


Planète Maa dans une galaxie inconnue à une époque incertaine. On trouve sur cette planète dipattes, cuménaudons, triptofanes et acromégas qui servent à l'attelage, ainsi que des animaux sauvages : kit kit, grenouilles rupestres, ratisseurs, sangsues des sables, écpinoptères, épéphors… Les urèles, que l'on pourrait comparer aux humains en raison de leur apparence et de leurs défauts, vivent en communautés disséminées. Dans ce premier tome, le désir expansionniste du Grand Maître d'Arkaie menace la Cité des Zutors.

Lombrica, un serpent géant brutal et cruel vie non loin de ces deux peuples, en toute discrétion, amateur d'orgies et accessoirement mère de Verapoisse. Verapoisse, serpent semi-divin de son état, supporte stoïquement ses parents. Dans ce roman d'aventure sont aussi abordés, avec humour et légèreté, des thèmes universels tels que le despotisme, le spécisme, la conscience de la science et la relativité des religions.


Extrait du livre écrit par Dominique Noudi


Mosa leva sa lampe à alcool au-dessus de sa tête pour éclairer la voûte du boyau souterrain qu'elle suivait maintenant depuis plus d'une heure. Des stalactites scintillèrent furtivement. Des doutes l'assaillirent : n'avait-elle pas fait preuve d'une stupide imprudence en se lançant dans cette exploration, seule et sans rien dire à personne ?

C'est en cherchant Hémoros, son animal de compagnie, qu'elle avait découvert l'entrée du tunnel. Elle avait cru le voir disparaître derrière un rocher et s'était précipitée pour le capturer. Hémoros excellait dans l'art du mimétisme : il prenait instantanément la couleur de l'endroit où il était posé. Mosa le repérait généralement grâce aux pupilles de ses yeux dont la lueur espiègle laissait dans l'air comme une vibration palpable. Mais là, rien. Elle avait introduit son bras dans une faille de la roche et avait eu la surprise de ne rencontrer que du vide, tandis qu'une forte odeur de moisi s'engouffrait dans ses narines.

- Hémoros !
- Hémoros, Hémoros, Hémoros ! Lui avait répondu l'écho.

Mosa avait compris qu'une grotte de grande dimension se cachait là, derrière, et que son animal, en pleine crise d'indépendance depuis quelques jours, s'y baladait tout de noir vêtu.
- Attends-moi, je reviens te chercher plus tard ! Avait-elle lancé par l'ouverture.

Hémoros comprenait le langage zutor bien qu'il ne le parlât pas. A vrai dire il n'émettait aucun bruit, c'était la discrétion personnalisée, c'était un varanil.
 
Très peu de personnes possédaient un varanil parce que très peu de gens désiraient la compagnie d'un animal invisible et silencieux en supposant qu'ils parviennent à en dénicher un. Mosa avait trouvé le sien en trébuchant dessus, dans les feuilles mortes au pied d'un arbre. Elle avait d'abord cru avoir heurté une racine, et elle était là, à genou, à contempler un peu bêtement le sol, quand sa silhouette bleutée lui était apparue... pour s'estomper aussitôt. Puis elle avait réapparu, teintée de jaune cette fois.

Dominant sa peur, Mosa avait posé les mains sur un corps écailleux au dos arrondi, et touché des pattes courtes et musclées agitées de tressaillements inquiétants. L'animal s'était mis à clignoter et à passer par toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. Mosa avait reconnu un varanil et son instinct lui avait soufflé que l'animal lui envoyait un signal de détresse. Elle l'avait ramassé, posé sur son épaule, en évitant de penser à la mâchoire aux dents acérées qui ballottait dans son cou, et emmené chez sa tante guérisseuse.

- Amaïs, Amaïs, j'ai un varanil malade, il faut l'aider, s'il te plaît, s'était écriée la petite fille en déboulant dans la cuisine où sa tante feuilletait un catalogue de sous-vêtements pour Zutors un peu trop enrobés. Amaïs avait sursauté, manquant de déchirer le descriptif d'une gaine révolutionnaire qui faisait le ventre et les fesses plats "sans comprimer". Elle avait beau elle-même posséder un don inexpliqué qui lui permettait de soigner autrui, elle ne croyait pas aux miracles et cherchait entre les lignes une explication rationnelle au prétendu phénomène amincissant.

- Mosa ! Se fâcha-t-elle, tu n'es pas obligée de crier ainsi, tu veux me faire mourir !

- Non, Tata chérie, surtout pas, je veux que tu soignes mon varanil.

- Ah bon, après ça je pourrai mourir ?

- Heu...si tu veux, avait balbutié Mosa sans comprendre la plaisanterie,... mais j'aimerais autant pas.

Amaïs avait hoqueté de rire, faisant trembler le gras de ses bras nus et s'était levée, au vif soulagement de sa chaise dont les pieds s'étaient redressés ostensiblement. Un sourire tendre avait plissé ses grosses joues en croisant le regard inquiet de la petite fille aux pommettes rosies par sa course.

- Bon, pose-moi ta bête sur la table, là, sans la lâcher.

Mosa avait dû dominer sa répulsion pour prendre à deux mains l'étrange et rugueuse créature qui pesait sur son épaule. Curieuse scène que ces deux Zutors maniant du vide avec mille précautions comme deux enfants qui joueraient au docteur, surtout que Tata Amaïs faisait quatre fois l'âge de sa camarade de jeux et cinq fois son poids. Amaïs avait promené ses doigts écartés sur tout le corps du varanil, appuyant par ci, appuyant par là, et s'était même penchée à un moment pour le sentir. Puis elle s'était frotté les mentons (le simple et le double), ce qui était généralement signe d'un diagnostic imminent.

L'animal n'avait pas bougé d'une écaille, cela semblait confirmer qu'il comprenait la langue zutor et acceptait d'être soigné, à moins qu'il n'ait été trop mal en point pour se débattre.

- Ton varanil s'est fait piquer par un épéphor, ma petite, avait-elle enfin expliqué. Comme tu le sais, cet insecte dispose d'un long dard qui lui permet d'injecter sous les écailles un venin paralysant à sa victime, même beaucoup plus grosse que lui. Heureusement il ne s'attaque qu'aux animaux à écailles, la nature est bien faite. Si tu n'étais pas intervenue, l'épéphor allait sans doute se laisser tomber de sa branche avec toute sa famille pour dévorer sa proie dès que le poison aurait fait son oeuvre. Mosa avait levé vers sa tante de grands yeux horrifiés.

- Mais ne t'inquiète pas, j'ai l'anti venin, avait ajouté Amaïs en ébouriffant de sa main boudinée les cheveux bruns de la plus sauvageonne des trois filles de sa sœur.

Depuis ce jour, le varanil stationnait sur l'épaule de Mosa, même si personne ne s'en apercevait. Elle l'avait nommé Hémoros en souvenir de la statue d'un dieu ancien que plus personne ne vénérait et qui représentait un Zutor à écailles. Cette statue postée au milieu de la place du marché l'impressionnait beaucoup quand elle était petite. Hémoros ne se déplaçait guère plus vite qu'une statue, et n'avait également du temps qu'une notion approximative, c'est sans doute pour cela qu'il s'attardait sous terre malgré les appels de son amie.
Mais la curiosité de Mosa avait été excitée, c'est pourquoi elle avait sauté sur le prétexte de sa disparition pour courir chercher l'équipement du parfait explorateur, deux lampes, une corde, une craie, une gourde d'eau, un bout de gâteau et des habits de rechange.