Rouchon Pierre La Mace et l'acide
256 pages
Poche : 11 x 18 cm
sur papier 80 g bouffant ivoire
Style litteraire : Roman
Numéro ISBN : 978-2-35682-284-0
20.69
€ TTC
Frais de port inclus France
Métropolitaine uniquement
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Présentation de La Mace et l'acide
La mace et l'acide relate l'histoire d'une ancienne principauté aux allures tranquilles. Mais ne nous y trompons pas c'est une pittoresque communauté que vous pourrez découvrir dans ce roman de truculents personnages. Tout l'univers de Pierre Rouchon.
Extrait du livre écrit par Rouchon Pierre
Le grain de sable
C’était le bon temps. Celui des discussions badines en salle des professeurs, longtemps après que la cloche ait sonné. Rassurés de savoir les surveillants sur les rangs, occupés à garder nos élèves, tout en profitant du grand air, de la pluie ou de la neige, aussi. Le bon temps des repas de Noël qui débordaient largement sur les heures de cours, entre nous, sans le petit personnel aux conversations désarmantes de superficialité. L’époque bénie des emplois du temps cousus main, prenant en compte les cours d’aquagym et les envies de chasse.
Depuis, hélas, tout a été mis à sac. Wadowski, nouveau maître des lieux, a cassé le ressort du bel esprit macéen. Désormais, les emplois du temps se veulent pédagogiques. La ponctualité imposée a tué la convivialité et pour couronner le tout, nous devons, comble !, partager la dinde avec les cureurs de chiottes et les gardes-chiourmes incultes !
Il n’est pas à une provocation près le bougre. Songez qu’il nous avait, peu après son arrivée, offert un jeu d’échec, pour la salle des professeurs. Tout simplement inqualifiable !
Nous reste-t-il du temps pour de telles activités ludiques !
Sait-il, ce gredin, qu’il nous est impossible de nous détendre un seul instant, tout un trimestre durant ? Et pourquoi un jeu d’échec ? Etait-ce innocent ou était-ce, comme nous préférâmes le penser, une métaphore blessante de ce fétide manieur de mots ?
Certains dirent : « laissons filer ». Pas nous !
Les historiques
Mais, me direz-vous, qui est-ce nous, en somme, qui sommes-nous ? Tout simplement les garants du fameux esprit de la Mace, notre chère école. Nous sommes cette huile lubrifiant les rouages d’un système bien conçu et si profitable à qui sait en jouer.
M. Vidal en était le guide. Et puis, chacun de nous, étions là pour verrouiller de toutes parts chaque tentative d’introduction du grain de sable néfaste pouvant mettre à mal notre patiente construction. Il y avait Mme Maistre et Mme Meret feignant la rébellion à chaque réunion du comité d’entreprise pour mieux juguler les plaintes du personnel. M. Gansard et Mme Dupuis au conseil d’établissement, dont la tâche était que rien ne bouge. Et puis, surtout, les Meyrand, véritables gardiens du temple.
Ceux qui fréquentent depuis longtemps cet établissement se souviennent que c’est ici qu’ils se rencontrèrent et se lièrent. Lui, jeune professeur d’histoire-géographie, passionné de chasse et de western. Elle, stagiaire comptable, ni passionnée ni passionnante mais comptable, en somme.
Tous deux sont des gens de la terre, « bourrus et pingres » comme certains médisants se plaisaient injustement à les décrire, osant même prétendre voir en eux « des manières de chevaux de trait, grosses papattes et œillères comprises ». Une honte, parlant de gens si bien comme il faut.
Sur ce chapitre, les indélicats, dont l’ignoble Raginel, conseiller principal d’éducation, continuaient parfois de la sorte : « Quiconque décèlerait un jour chez l’un ou l’autre un semblant de finesse, se verrait octroyer le titre de chercheur émérite », ou encore, souhaitant faire de l’esprit avec du fiel : « Leur étroitesse d’esprit relevant du cas d’école, il est logique que ce fût au sein d’un collège qu’ils se rencontrèrent. »
Les Meyrand résident à Saint-Gerbier non loin d’Autrand, dans une maison de lotissement. Les mauvaises langues prétendent que les traites de celle-ci furent payées grâce à la générosité de Dame Mace. Calomnie, assurément.
M. Meyrand
Avant l’arrivée du démoniaque Wadowski, Mme Meyrand était comptable mais plus encore directrice financière, de fait, de cette institution. Quant à Monsieur Meyrand, le bon Vidal l’avait nommé directeur adjoint, chargé de pas grand-chose, ou plus précisément, de trois fois rien. Son activité principale consistant à patrouiller dans les couloirs, lorsqu’il n’avait pas cours, guettant l’élève égaré, ou l’employé en retard à qui il indiquait sa désapprobation en regardant sa montre.
Il était grassement payé pour sa maigre besogne et son contrat de travail, rédigé par sa femme et signé par lui seul, était un chef-d'œuvre. Ce précieux document stipulait, je cite, qu’il « ne pouvait être demandé, sous aucun prétexte, à M. Meyrand, directeur adjoint, de travailler durant les vacances scolaires ». Admirable !
En vérité, sans remettre en cause mon amitié pour le couple, l’immensité de l’incompétence de Bertrand Meyrand est assez difficile à restituer en quelques lignes.
Le bonhomme occupait un bureau, refait à neuf, jouxtant celui de M. Vidal. A l’intérieur, se trouvait un ordinateur, équipé d’une imprimante. Seul hic,
M. Blandel, responsable du réseau informatique affirme aujourd’hui encore qu’aucun document, même pas le moindre courrier, n’est sorti de cette machine. Il eut beau disséquer la bestiole, il ne trouva nulle trace d’activité durant les très nombreuses années où dura cette farce.