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couverture du livre Nouvelles de la surface écrit par Sellaire Jack

Sellaire Jack Nouvelles de la surface

276 pages
A5 : 14.8 x 21 cm
sur papier 80 g bouffant ivoire
Style litteraire : Science-fiction
Numéro ISBN : 978-2-9555982-3-8

20.69 € TTC

Frais de port inclus France
Métropolitaine uniquement

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Présentation de Sellaire Jack
éditeur de Nouvelles de la surface


Bien que pour les besoins de cette présentation il parle de lui à la troisième personne, Jack Sellaire est un jeune homme sans prétention. Petit, il était plus attiré par les chiffres que par les lettres. Puis l'adolescence inversa la tendance sans pour autant impliquer une soif de lecture ni le prédestiner à une carrière d'écrivain.

Le hasard des expériences de la vie l'a amené à écrire des articles pour La Voix du Nord, une année riche en enseignements durant laquelle il rencontra un jeune auteur au lendemain de la sortie de son premier livre ; Cet échange fut une révélation. Inutile de vous expliquer la suite…

Jack Sellaire considère l'écriture de son premier ouvrage comme une des expériences les plus intéressantes qu'il ait vécu. Ce deuxième ouvrage n'a pas tardé à suivre et il ne sera pas son dernier... Tant qu'il continuera à s'amuser en écrivant !

Présentation de Nouvelles de la surface


Ils vivent dans différents pays et ne se connaissent pas mais ils ont tous fait la même rencontre : Celle d’Espoir, un personnage aussi énigmatique que charismatique et surtout avide d’expériences humaines. Celui-ci a offert à chacun de ces « cobayes » un pouvoir inestimable.

Savoir lire dans les pensées, Faire apparaître des billets de banque à l’infini, Posséder le don d’ubiquité, Communiquer avec les animaux…

Ce recueil contient 12 nouvelles présentant 12 réponses différentes à cette question : « Et vous ? Quel pouvoir choisiriez-vous ? »


Extrait du livre écrit par Sellaire Jack


En sortant de sa cage

Espoir venait de repérer le sujet idéal. Pour cette première expérience, il souhaitait privilégier un sujet facile, un sujet dont le comportement lui rappellerait le sien. Il aurait ainsi plus de facilités à l’anticiper. Alors que les clients de l’hypermarché allaient et venaient en continu, cet homme-là se tenait seul sur son point d’observation. Du haut d’une mezzanine surplombant les caisses du magasin, il contemplait pensivement la scène faisant partie de son quotidien. L’intelligence hors du commun d’Espoir l’avait immédiatement conduit à déduire que cet homme était un cadre haut placé de cette grande enseigne. Il n’était pas le patron mais son rôle dans l’entreprise était important. L’annor l’avait décidé, cet homme serait le premier ! Il fallait maintenant l’approcher.

Espoir repéra l’escalier menant à la mezzanine, il était situé derrière le deuxième poste des vigiles en charge de la sécurité du magasin. Discrètement placé en marge d’une entrée pour les clients. Il inspecta ensuite les plafonds du centre commercial à la recherche des appareils assurant la vidéo surveillance. Le dispositif était trop conséquent pour se contenter de se téléporter d’un point à un autre de l’hypermarché sans être vu.

L’annor procéda à l’ancienne. Il sortit du gigantesque centre commercial et longea le bâtiment principal jusqu’à se retrouver derrière les bennes. Là il transforma son apparence pour celle d’un commercial au costume griffé. Avec une allure assurée, il retourna à l’intérieur et se dirigea vers les vigiles barrant le passage vers l’escalier. Avant même que l’annor eut prononcé le moindre mot, son aura avait déjà convaincu les deux armoires à glace de le laisser passer. Il se contenta de leur expliquer très simplement qu’il était un représentant de Worfit Cola, le n°1 mondial du soda, pour que l’accès à la mezzanine s’ouvre à lui. En montant, il croisa deux hôtesses de caisse cinquantenaires tenant chacune sous leur bras droit une grosse trousse contenant le fond de caisse leur permettant de tenir leurs deux prochaines heures de travail. Espoir les salua poliment. Il accéda à la mezzanine et rejoignit l’homme qui n’avait toujours pas bougé lors des cinq dernières minutes. Au fur et à mesure qu’il s’approchait de lui, il changea d’allure pour une démarche moins assurée, plus simple, plus décontractée, puis il s’installa à un mètre de lui, il imita la posture du cadre de l’hypermarché. Le buste penché, les avant-bras posés sur la rambarde, les deux mains jointes.

L’homme était ventripotent mais il ne semblait pas souffrir de sa surcharge pondérale. Il avait la quarantaine entamée. Les cheveux blond-gris courts et légèrement bouclés. Les yeux clairs. Il portait les vêtements classiques du cadre de ce genre de secteur, un pantalon sombre et une chemise blanche dont la poche avant détenait un stylo-plume. Il n’avait pas réellement pris conscience de l’arrivée d’un visiteur auprès de lui, il était noyé dans ses pensées, comme imperturbable. Espoir lui accorda quelques secondes de répit avant d’engager la conversation :

« Vous m’intriguez cher ami, qu’observez-vous ainsi pour que cela vous scotche sur place pendant de si longues minutes ?

- Oh, bonjour monsieur, je ne vous avais pas vu arriver. Je… Disons que j’aime observer les gens, que ce soit ici au boulot ou dehors. C’est très instructif, surtout lorsque nous sommes chargés du recrutement. Confia le cadre de l’hypermarché.

- Ah oui je vois, j’ai à faire au directeur des ressources humaines. Enchanté, je me présente : Marc Poissy, le nouveau directeur marketing France de Worfit Cola. Je fais le tour des plus gros hypermarchés de la région afin de revoir certaines modalités de nos contrats. Je sors d’un rendez-vous avec votre service marketing, je vous ai vu, j’ai eu envie de venir discuter.

- Enchanté M. Poissy. Gérald Trajan, comme vous le savez déjà, responsable des ressources humaines. »

Les deux hommes se firent face et se serrèrent la main amicalement. Gérald avait généralement très peu d’estime pour toute personne travaillant dans un service marketing. Cette fois-ci fut différente. Espoir, sous la fausse identité de Marc Poissy avait dégagé une première impression très positive au cadre du magasin. Ce dernier avait ressenti une bienveillance bien trop souvent absente chez les spécialistes du marketing. Gérald n’avait bien entendu aucune idée de la véritable identité de son interlocuteur, il ne pouvait imaginer qu’il faisait face à la personne la plus intelligente sur Terre, surclassant les plus grands génies de la planète de nombreuses années-lumière d’avance en termes de connaissances et de savoirs. Entre les deux hommes, le courant passa comme une lettre à la poste. Ils échangèrent pendant plusieurs minutes, la confiance s’installa, Gérald se surprit même à lui relater quelques anecdotes loufoques à propos d’entretiens de recrutement accordés à certains jeunes issus de milieux difficiles venus postuler. Espoir savait que Gérald vivait en permanence la pression pesant invariablement sur les cadres de la grande distribution. Il savait qu’il avait besoin de relâcher cette pression et une conversation bien sentie sortant de l’ordinaire lui ferait le plus grand bien. L’annor orienta la conversation vers le thème du bonheur. Il demanda à Gérald en quoi consistait sa vision du bonheur. Ce dernier soupira profondément avant de reprendre sa posture de l’observateur rêveur :

« Ma vision du bonheur ? Voilà une question intéressante. Dans mon cas, j’oublie hélas bien trop souvent de me la poser. C’est surtout le cas depuis que je travaille ici, tout va trop vite. Le temps défile, les années passent mais je ne les vois pas passer. Si je réponds à chaud, je dois admettre que ma vision du bonheur, c’est de ne plus être ici. J’ai vu ce que j’avais à voir, j’ai plutôt envie de tranquillité. Si je pouvais changer de lieu de vie, la montagne serait le cadre idéal, moins de monde, la nature, l’air pur… L’idéal serait pourquoi pas de tenir une ferme, d’élever des animaux. Oh oui, ce serait le bonheur. »

Gérald était prêt à recevoir la question ultime, Espoir le savait. Ce dernier n’avait plus qu’à lui asséner :

« Dites-moi Gérald, imaginons un instant que les génies existent, si l’un d’eux vous proposait d’exaucer un souhait, lequel lui demanderiez-vous ?

- A ce sujet je peux vous répondre sur-le-champ, depuis gamin je rêve de pouvoir communiquer avec les animaux. J’ai bien conscience qu’il y a des souhaits bien plus profitables à demander mais celui-ci a toujours stimulé mon imaginaire. »

Alors que le directeur des ressources humaines développait son souhait, ses yeux s’écarquillaient, l’enthousiasme se prononça via les traits de son visage. Il était parti ! Espoir n’avait plus besoin de le guider, le quarantenaire y allait de son long monologue :

« Cela peut vous paraître paradoxal pour un spécialiste des ressources humaines, mais j’ai le sentiment de mieux comprendre les animaux que les humains. D’ailleurs je viens de faire le distinguo entre animaux et humains, par réflexe, mais il faut se l’avouer, l’humain est lui-même parfaitement animal. Observez-les avec moi un instant, vous voyez ! Ils déambulent dans les rayons, leurs trajectoires, leur façon de se déplacer, leur organisation, c’est une fourmilière là-dessous.

Cela m’a toujours amusé, ce paradoxe de l’humain qui se voit constamment au-dessus de l’animal, il se voit plus intelligent, il se considère comme l’unique être vivant maître de son destin… Tu parles ! Regardez-moi comment ces humains se laissent gentiment embobiner ! Leurs faits et gestes sont anticipés pour le plus grand bien de notre belle enseigne. La disposition des rayons des hypermarchés respecte une règle simple, l’entrée principale est toujours située sur la droite et lorsque nous rentrons dans le magasin, les produits hi-tech et autres produits les plus chers sont placés à droite. A l’inverse, plus nous nous enfonçons vers la gauche du magasin, plus les produits sont abordables. Cela n’est pas le fruit du hasard. C’est scientifiquement prouvé : le commun des humains s’intéressera toujours en premier à ce qu’il verra sur sa droite. Etant donné qu’il n’a pas encore démarré ses courses et que son caddie est vide, il sera plus enclin à accepter une grosse dépense imprévue dans son budget. Puis il se dirigera vers les rayons de gauche, son caddie se remplira mais au fur et à mesure qu’il avancera, les prix affichés seront de plus en plus ridicules par rapport aux produits qu’il aura déjà planifiés d’acheter. Ainsi il sera moins regardant sur le coût total de ses courses. Notre cher magasin sera parvenu à soutirer le maximum d’argent de son cher client bien aimé. Tout cela sans que cet humain ne se rende compte de l’entourloupe dont il a été victime. Les techniques comme celle-ci sont nombreuses ici, mais… Oui je suis bête, je ne sais pas pourquoi je me suis lancé dans ces explications, vous êtes très certainement déjà au courant de toutes ces pratiques, après tout, vous en êtes un spécialiste. Enfin en tout cas, tout cela pour dire que même si je considère les humains comme des animaux à part entière, sans dénigrement hein ! J’ai une préférence pour les animaux qui ne gaspillent pas comme nous, ceux qui n’ont peut-être qu’une conscience limitée mais qui profitent de leur vie au maximum. »

Espoir sourit à son interlocuteur, il venait de recevoir la tirade qu’il souhaitait. Gérald s’était assez ouvert pour qu’il puisse opérer. Il ne patienta pas plus longtemps et se connecta psychiquement à lui. Gérald sentit une drôle de sensation, il ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Pendant quelques instants, il perdait le contrôle sur son être. Il demeurait debout, dans la même position, sans comprendre comment il faisait pour rester ainsi, il ne sentait plus son corps. Puis il reprit possession de son corps. L’annor venait de lui transmettre le don dont il avait toujours rêvé, Gérald pouvait maintenant communiquer avec les animaux. Seulement, il l’ignorait, il devait le découvrir par lui-même.

L’opération réussie, Espoir écourta la conversation. Il le remercia de l’échange fort sympathique et prétexta un rendez-vous dans un autre hypermarché de leur chaîne. Encore déboussolé, Gérald lui fit signe au revoir et l’observa partir. Il se tâta le front à la recherche de signes de fièvre, sa température semblait tout à fait normale. Il regagna son bureau pour s’asseoir un moment.